Centrales débrayables

Bonjour,

Pour faire suite aux discussions initiées suite aux chutes de neige de novembre dernier, et en lien avec l'actualité de ce printemps, se pose la question du modèle des centrales que nous installons : désormais surtout des grandes toitures (36k) sur bâtiments publics en vente totale.

Un inconvénient de ces centrales est que sans alimentation/assistance du réseau électrique pour faire fonctionner l'onduleur, elles ne fonctionnent pas, et ne servent à rien. On fait de la transition énergétique - et c'est déjà bien - mais il manque un peu de la composante "autonomie".

Est-ce que certains auraient étudié des installations techniques capables d'injecter sur le réseau mais aussi d'alimenter un bâtiment de façon autonome en cas de besoin.

Une idée serait de proposer ces systèmes à des particuliers pour des petites centrales (3kWc), mais très probablement non financés par le CV car très probablement absolument pas gérable économiquement.

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Cette question est régulièrement posée. Elle fait partie des questions "philosophiques" comme on dit.

Il n'y a pas de solution idéale qui répondrait à la question. Je peux tenter de l'expliquer.

une centrale photovoltaïque en injection sur le réseau se cale sur les caractéristiques du réseau (tension et fréquence) et sa production est injectée sur le réseau. Pour la centrale de production, le réseau devient alors une charge électrique, ou un un stockage presque infini d'énergie électrique. Lorsque le réseau est coupé (câbles cassés, coupure pour entretien, panne générale), les caractéristiques s'effondrent (tension, fréquence) et le "stockage" disparaît. Le système se met donc en veille. Les modules ne servent plus à rien.

Pour que les modules photovoltaïques puissent continuer à produire, il faut donc reconstituer un stockage et avec lui un autre ensemble fréquence-tension. Un stockage permet de faire tampon, de fixer une tension de travail du système en absorbant le surplus, en complétant lorsque les besoins (charges) sont trop importants. Le stockage qui nous vient le plus facilement à l'esprit lorsqu'on parle d'électricité, ce sont les batteries électro-chimiques (acide-plomb, nickel-Cadmium, Ion-Lithium ...).

Il faudrait donc qu'en cas de coupure réseau, le champ de module "bascule" sur un autre système comprenant du stockage.

Il convient donc d'examiner les contraintes d'un tel stockage: il doit être fiable dans le temps, sans bénéficier d'apport d'énergie pendant tout le temps où le réseau est existant, c'est à dire à peu près tout le temps. Aucun élément électro-chimique ne remplit ces conditions. On peut donc imaginer un stockage différent type mécanique, ou peut être par électrolyse. Le mécanique demande forcément un entretien, pour l'électrolyse, je n'ai pas d'informations mais le montage est onéreux. Quelques inventeurs s'aventurent sur ce terrain de stockage alternatif, depuis déjà longtemps. Qui sait ?

Enfin il ne faudrait pas oublier que pour que la "bascule " ait lieu, lors de coupure réseau, il faut un enclenchement automatique, et il convient d'avoir tous les appareils appropriés, soit au moins autant que pour l'installation dite injection réseau (en général 2x plus). Le terme "débrayable" ne convient pas. On débraye quand on enlève la liaison à la boite de vitesse. Là il s'agit de changer de vitesse (débrayer et embrayer).

Il n'y a guère que dans des systèmes en autoconsommation avec stockage et fonction sécurisation que nous avons ces possibilités. Ces installations ne vendent que le surplus, à 6 ou 10 centimes le kWh et ne s'amortissent jamais. Ces installations sont très coûteuses et complexes. Elles demandent une surveillance hebdomadaire par liaison internet et du personnel bien qualifié, les fournisseurs forment leurs installateurs et les qualifie.

Il se peut que la nature du stockage (actuellement Ion Lithium immobile) soit l'obstacle majeur et que d'autres réponses puissent être apportées mais plus tard. Par exemple, des batteries déjà utilisées au quotidien par ailleurs : le véhicule électrique (mais sera t il là, branché, lors de la coupure réseau ?) ....


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Emmanuel Dubois, gérant Société ENERSUN


Le 2020-04-16 08:36, Site Centrales Villageoises a écrit :

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Je n'ai rien à ajouter aux informations d'Emmanuel, très claires, sur la nécessité de disposer d'un onduleur hybride capable de gérer de manière intelligente à la fois l'injection sur le réseau et l'autoconsommation (avec ou sans stockage).

En revanche, je ne suis pas tout à fait d'accord sur l'aspect "philosophique" de la question de l'autonomie et donc de l'autoconsommation. Pour moi, il s'agit aujourd'hui d'une question "économique" et donc rationnelle.

J'ai eu la chance de pouvoir échanger avec de nombreux experts ces derniers mois sur les sujets de l'autoconsommation et donc du stockage, et de me faire ma propre opinion. Voici mes quelques conclusions (certes perfectibles mais je l'espère néanmoins utiles :)

A. Les jours de la revente *totale* à EDF-OA sont comptés, l'avenir est à l'autoconsommation (tout en restant connecté au réseau) car le coût du kWh photovoltaïque arrive à quasi parité avec les autres modes de production d'électricité.

B. L'autoconsommation sans stockage est d'ores et déjà envisageable dans certains cas pour un bâtiment, à condition de bien analyser les consommations en amont, et en établissant un PPA.

C. Qui dit autoconsommation dit dans de nombreux cas stockage, or la seule solution viable à court et moyen terme est le stockage par batteries. Les autres technologies connaîtront peut-être un saut qualitatif sur le long terme (à horizon 20 ans) mais rien n'est moins sûr.

D. En matière de batteries, le lithium-ion a désormais une longueur d'avance sur toutes les autres technologies concurrentes. Le coût de stockage "physique" du kWh localement dans une batterie sera bientôt à parité avec le coût du stockage "virtuel" dans le réseau... après la révolution du PV, c'est une révolution supplémentaire qui se prépare !

Pour ceux qui ont le temps, je développe ci-dessous mes 4 conclusions avec plus de détails.


A. La fin prochaine du rachat et l'avènement de l'autoconsommation

Les modules et onduleurs PV ont connu une chute de coût drastique (ce sont désormais des "commodities") qu'aucun expert n'anticipait réellement. Comme l'indique le rapport 2019 de la CRE (Commission de Régulation de l'Energie), les dernières grandes installations au sol en France sont aussi compétitives (48 € / MWh = 4.8 cts / kWh) que le nucléaire *historique*. Les jours des subventions au rachat de l'électricité PV sont donc comptés... et c'est la meilleure nouvelle possible pour la transition énergétique, car cela signifie que ce marché est désormais rentable et que des sommes de plus en plus importantes y sont investies par le secteur privé, les banques, les fonds de pension, etc. mais aussi et heureusement les citoyens comme nous.

La fin des rachats subventionnés va entraîner une forte hausse des projets en autoconsommation.

B. Cas de l'autoconsommation sans stockage

Faire coïncider la consommation avec la production est quasiment impossible en pratique, d'où l'intérêt de toujours rester connecté au réseau :
- soit pour injection du surplus en cas de sur-production
- soit pour soutirage lors en cas de sous-production

On voit que cela correspond à utiliser le réseau comme une "batterie virtuelle".

Une très forte autoconsommation ("autonomie énergétique" diront certains) sans stockage est possible uniquement en présence de consommateurs importants utilisés *en journée* : machines de production sur site industriel, transformation sur site agricole, appareils de cuisson ou groupes froids en restauration / distribution, etc. Une analyse détaillée des consommations en amont du projet est nécessaire, idéalement sur plusieurs mois, et avec un fort niveau de granularité (pas de temps de 10 minutes).

Dans la pratique, et sans rentrer dans les détails, cela se fait ailleurs mais pas (encore) pour les CVs :

- On remplace le contrat de revente à EDF-OA (ou Enercoop) par un PPA (Power Purchase Agreement), c'est-à-dire un contrat de gré à gré de fourniture d'électricité avec le propriétaire du bâtiment. Le tarif de vente du kWh est fixé dans le contrat, ainsi que la durée du contrat lui-même (pas forcément 20 ans).

- On injecte le surplus dans le réseau Enedis au tarif de rachat correspondant à la tranche de puissance (par exemple 10 cts / kWh pour une centrale de 9 kWc, 6 cts / kWh pour une centrale de 36 kWc) : l'intérêt est qu'en dimensionnant correctement l'autoconsommation on doit pouvoir injecter beaucoup moins dans le réseau et donc limiter considérablement les coûts de raccordement ! On peut par exemple imaginer raccorder une centrale de 36 kWc en 10 KVA ou moins.

Nota Bene : dans un monde idéal (mais soutenable...) dans lequel la production industrielle serait calquée sur la présence de soleil et de vent, comme à l'époque des moulins (principe de "run the economy on the weather"), l'autoconsommation serait totale et sans stockage. Les particuliers équipés en PV sans stockage le savent bien, qui font tourner leurs gros consommateurs (lave-linge, plaques chauffantes, etc.) quand le soleil brille.

C. Autoconsommation avec stockage et technologies en lice

Souvent, il faut stocker pour atteindre un taux d'autoconsommation intéressant (passer de 30 à 60% d'autoconsommation sur une année par exemple). En effet, il y a consensus chez les experts sur l'augmentation future du prix de l'électricité du réseau, ce qui signifie qu'autoconsommer sera à l'avenir plus intéressant économiquement que d'acheter sur le réseau...

Ci-après une revue complète des technologies de stockage :

C.1. Sous forme d'énergie potentielle : cette solution constitue encore aujourd'hui 98 à 99% du stockage d'électricité dans le monde sous forme de réservoirs dans lesquels de l'eau est pompée puis turbinée (STEP). Inutile d'y penser pour les CVs car stocker 1 kWh nécessite de soulever 1 tonne d'eau à 360 m de haut... Les volumes se comptent donc généralement en km3 et les dénivelés en centaines de mètres. Un exemple de micro-STEP est toutefois en train de voir le jour en Corse

C.2. Sous forme d'énergie thermique : il s'agit de faire chauffer de l'eau (stocker 1 kWh nécessite d'élever la température de 200L d'eau de 4°C). La chaleur étant toutefois la forme d'énergie la plus dégradée, ce n'est pas une utilisation très efficace ni très noble du vecteur électricité... Mais avec des modules PV de plus en plus puissants et de moins en moins chers, et des pompes à chaleur de plus en plus efficaces avec un COP (coefficient de performance) supérieur à 3, cela pourrait éventuellement s'avérer plus intéressant à terme dans certains cas que du solaire thermique pour générer de l'ECS (Eau Chaude Sanitaire), dans des bâtiments communaux par exemple.

C.3. Sous forme de conversion en gaz ("power-to-gas") : le cas le plus connu est l'hydrogénation (production d'hydrogène H2 par électrolyse de l'eau). Le rendement du procédé est atroce (de l'ordre de 15% à 25%) en raison des nombreuses étapes qui entraînent des pertes énormes : électrolyse de l'eau, puis compression de l'hydrogène à 800 bars, puis transport avec pertes car l'hydrogène est très volatil, puis pile à combustible pour récupérer l'électricité.

Le vecteur hydrogène ne pourra donc fonctionner que lorsque la production d'électricité d'origine renouvelable dépassera la consommation. C'est le cas certains jours au Danemark (ou an Nord de l'Allemagne) quand le vent souffle sans trêve sur les gigantesques champs éoliens, mais ne le sera pas chez nous avant très longtemps.

Nota Bene : je n'ai pas creusé la méthanation (production de CH4 à partir d'électricité, d'eau et de CO2) car la combustion du méthane ne produit pas directement de l'électricité (on retombe donc sur le problème du rendement des turbines) et rejette du CO2...

C.4. Quelques autres technologies à oublier
- énergie cinétique (volants d'inertie) : stockage limité à quelques minutes ou quelques heures en raison des frottements
- stockage par air comprimé (CAES) : dissipe beaucoup trop d'énergie sous forme de chaleur lors de l'étape de compression
- supercondensateurs : densité énergétique trop faible, autodécharge trop rapide

C.5 Sous forme d'énergie électrochimique (batteries) : c'est aujourd'hui *la* solution pour stocker de l'électricité d'origine PV en local. Aujourd'hui la filière lithium-ion se structure à une vitesse phénoménale, les courbes de prix suivent la même pente descendante que celle des modules PV.

Les autres technologies traditionnelles (plomb) ou émergentes (redox) sont donc condamnées à rester marginales :

- plomb-gel : densité énergétique faible, cyclage faible (300 à 1500 cycles, avec un pourcentage de décharge souvent limité à 30 ou 50% dans la pratique) et donc un coût par kWh stocké aussi élevé que le lithium-ion, *sans les autres avantages*

- vanadium (redox flow) : belle technologie offrant jusqu'à 20000 cycles à 100% de décharge, mais malheureusement filière peu développée d'où des coûts élevés et une faible disponibilité

Nota Bene : contrairement aux nombreuses idées reçues, la ressource en lithium est abondante (aucun risque de pénurie) et le lithium se recycle aussi bien que le plomb des traditionnelles batteries plomb-gel. Les ressources sont même malheureusement si abondantes qu'il est aujourd'hui moins cher d'extraire le lithium que de le recycler... Ceci devrait toutefois évoluer rapidement car la filière de recyclage va bénéficier d'investissements colossaux.

D. Des batteries lithium-ion matures à un coût bientôt en parité avec le stockage réseau

Le lithium-ion se décline lui-même en de nombreuses technologies (essentiellement la composition de la cathode). Pour simplifier :

- NMC (Nickel Manganèse Cobalt) pour un usage en mobilité / batteries de véhicules. Les plus sont la densité énergétique maximale et donc un poids limité, ainsi que la très bonne cyclabilité (6000 cycles à 80% de décharge). Les inconvénients sont le risque d'incendie ("thermal runway") et la présence de cobalt (élément rare et majoritairement extrait dans des conditions affreuses en République Du Congo).

- LFP (Lithium Fer Phosphate) pour un usage stationnaire, typiquement un bâtiment. Les plus sont la durée de vie (cyclabilité sans perte de capacité de charge encore plus importante que pour le NMC), l'utilisation d'éléments extrêmement abondants (fer, phosphate) et l'absence de risque d'incendie. Le moins est le poids plus important (mais ce critère n'a pas d'importance pour du stockage dans un bâtiment).

Par conséquent, pour stocker de l'électricité PV avec des batteries aujourd'hui afin de maximiser l'autoconsommation, on dispose de 2 solutions :

D.1 Charger une flotte captive de véhicules électriques (qui ne sont jamais que des "batteries sur roues"), avec à terme un fonctionnement en mode V2G (Vehicle to Grid, plus d'infos ici) qui permet de récupérer dans le bâtiment l'énergie stockée dans le véhicule - c'est émergent en France mais déjà bien développé en Allemagne et dans les pays nordiques.

D.2 Charger une batterie stationnaire - cela se fait beaucoup dans le résidentiel et se développe maintenant ailleurs. J'ai récemment calculé que le point de bascule économique était déjà atteint pour les centrales de plus de 9 kWc ! C'est-à-dire que le coût de stockage "physique" du kWh localement dans une batterie est à parité avec le coût de stockage "virtuel" dans le réseau, cf. ci-dessous

Coût stockage réseau vs batterie LFP

J'ai passé pas mal de temps à réfléchir à toutes ces questions, et j'apprécierais beaucoup vos retours et/ou critiques si vous avez eu le courage de me lire jusqu'au bout, merci par avance !

Thibault Hanin - CV Soleil Sud Bourgogne

Bonjour Thibault

Merci beaucoup pour toutes ces informations, je vais communiquer ce
message
aux administrateurs d’Ener’Guil.
Sur notre territoire (Guillestrois Queyras) nous avons eu effectivement
plusieurs propriétaires
qui nous demandaient de les aider à installer des PV pour de
l’autoconsommation.
Nous n’avons pas répondu positivement pour l’instant.
Le montage est à l’étude je crois au niveau des CV.
A suivre

Luc Herry
Président
SCIC ENER’GUIL
Centrales Villageoises
Maison du Parc
La Ville
05350 ARVIEUX
www.energuil.fr

Le 2020-04-21 00:49, Site Centrales Villageoises a écrit :

Bonjour,

je reviens sur la discussion. Certains éléments ne sont pas discutables, ils dépendent trop de technologies en devenir, pour les stockages électro-chimiques (il existe (era) du Air-Zinc par exemple) et la technologie acide plomb a encore quelques surprises à nous faire découvrir. Laissons l'avenir nous dire.

pour les batteries Ion Lithium Fe-Phosphate, les prix diminuent, en effet mais la décroissance des prix est ralentie par la hausse de la demande. Nous verrons bien, mais autant la baisse de prix annoncée par l'Ademe est repoussée vers le futur, tandis que la baisse des prix des modules est arrivée plus vite que prévue (prospectives Alain Ricaud)

Les chiffrages dans les tableaux me posent question, mais c'est quelque part une bonne base de réflexion et d'échanges

Tableau 1 : il est donné un comparatif avec 1 kWh du réseau pour 1 kWh vendu au réseau (tarif de vente). En autoconsommation on a plutot 10-20 % d'autoconsommé directement pour 80% injectés, mais ça dépend de chaque site et de la taille de l'installation.

Tableau 2 : A mon sens tous les coûts ne sont pas pris en compte. J'ai comme prix installateur un placard BYD Fe 5800 E HT pour 11.52 kWh (kWh utilisables à faible puissance), avec le module de surveillance de batteries. Il n'y a pas 13.5 sauf à placer un placard supplémentaire.

Le système Hybrid ne peut fonctionner qu'avec un coffret contenant un compteur (smart meter), des relais, avec temporisation. ce coffret coute 1050 euros HT. Ce surcoût doit se rajouter au surcoût de l'onduleur

enfin, il n'est pas comptabiliser le travail supplémentaire de l'installateur. Une des sources de travail supplémentaire est la sélection des charges secourues en cas de bascule en autonome. L'onduleur Hybride n'a en effet pas la capacité à secourir toutes les charges électriques d'un foyer français. Pour note : le système Hybride de fronius n'est pas sensé travailler en mode autonome plus de 15 % (de son temps de fonctionnement je crois, sinon plus de garantie)N Le surcoùt d'installation est alors facilement au moins de 800 euros HT

Je pense que pour un tel système il est important d'augmenter les garanties à 10 ans minimum. C'est déjà le cas pour les batteries, il faut le faire pour l'onduleur

Si la batterie est donnée pour 6000 cycles, on peut espérer qu'elle tienne 16 ans ? Aujourd'hui, j'en doute mais je peux me tromper

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Emmanuel Dubois,

Le 2020-04-21 00:49, Site Centrales Villageoises a écrit :

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Bonjour,

Merci pour tous ces échanges très documentés. Je reviens sur la réponse de mon ami Thibault et reprends la structure de son texte.

A. La fin prochaine du rachat et l'avènement de l'autoconsommation

La parité des prix de la production des centrales PV avec ceux des fournisseurs ne se rencontre que pour les centrales géantes. Pour les centrales à taille humaine, cela attendra encore un peu que les prix des fournisseurs augmentent. Je ne suis pas certain que cela soit une bonne nouvelle car le déploiement des centrales géantes ne se fait pas seulement sur des délaissés mais souvent au détriment d'autres usages de l'espace. S'il n'est plus un sujet uniquement philosophique, il n'est pas un sujet uniquement économique mais reste un sujet politique.

C.1. Sous forme d'énergie potentielle

Certains ont imaginé de soulever et abaisser des gueuses de béton armé. Leur densité est 2,5 fois supérieure à celle de l'eau. Cela se ferait avec des grues à plusieurs bras disposés symétriquement. Je suis sceptique sur la disponibilité de ces dispositifs par grand vent.

C.3. Sous forme de conversion en gaz ("power-to-gas") : la méthanation permet de combler des besoins énergétiques mobiles.

C.5 Sous forme d'énergie électrochimique (batteries) : concernant la disponibilité du lithium, son abondance se fait au détriment de populations et d'écosystèmes fragiles. Ne pas se fier aux seuls calculs économiques des industries minières qui ont l'habitude de taire les trop nombreuses externalités de leurs activités.

D.2 Charger une batterie stationnaire

Je compléterais les commentaires : la présentation du coût du stockage se base sur un cyclage parfait : 6000 cycles, avec une profondeur de décharge de 60% et une recharge à 100% à chaque fois. Je doute que cela soit réaliste sur la durée de 6000 cycles et généralisables à toutes les situations qui dépendent de l'ensoleillement local et des profils de consommations nycthéméraux sur l'année.

Cordialement
Michel LOPEZ

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Merci beaucoup Emmanuel et Michel pour vos retours !

Je reprends vos commentaires en bleu ci-dessous, en ajoutant mes remarques.

Pour les batteries Ion Lithium Fe-Phosphate, les prix diminuent, en effet mais la décroissance des prix est ralentie par la hausse de la demande.

Oui, c'est vrai que les capacités de production en cours en construction dans le monde entier (gigafactories) portent en majorité sur les batteries de véhicules électriques, et donc la technologie NMC... il faudrait idéalement que l'Europe investisse dans des capacités de production locales de LFP post-coronavirus.

Les chiffrages dans les tableaux me posent question, mais c'est quelque part une bonne base de réflexion et d'échanges

Tableau 1 : il est donné un comparatif avec 1 kWh du réseau pour 1 kWh vendu au réseau (tarif de vente). En autoconsommation on a plutot 10-20 % d'autoconsommé directement pour 80% injectés, mais ça dépend de chaque site et de la taille de l'installation.

Pour mon calcul, il est vrai que j'ai fait l'hypothèse d'une autonomie maximale, c'est-à-dire d'une autoconsommation sans revente (ou avec revente a minima)... En prenant pour base le "kWh stocké", je ne considère que la consommation du bâtiment (ou des bâtiments dans un cas d'autoconsommation collective / mini grid) et pas l'ensemble des kWh produits et revendus dans le cas où la production totale de la centrale excède largement la consommation annuelle du bâtiment.

Dans tous les cas, il faut comme tu le soulignes adapter le calcul à la réalité du projet considéré.

Tableau 2 : A mon sens tous les coûts ne sont pas pris en compte. J'ai comme prix installateur un placard BYD Fe 5800 E HT pour 11.52 kWh (kWh utilisables à faible puissance), avec le module de surveillance de batteries. Il n'y a pas 13.5 sauf à placer un placard supplémentaire.

Le système Hybrid ne peut fonctionner qu'avec un coffret contenant un compteur (smart meter), des relais, avec temporisation. ce coffret coute 1050 euros HT. Ce surcoût doit se rajouter au surcoût de l'onduleur

enfin, il n'est pas comptabiliser le travail supplémentaire de l'installateur. Une des sources de travail supplémentaire est la sélection des charges secourues en cas de bascule en autonome. L'onduleur Hybride n'a en effet pas la capacité à secourir toutes les charges électriques d'un foyer français. Pour note : le système Hybride de fronius n'est pas sensé travailler en mode autonome plus de 15 % (de son temps de fonctionnement je crois, sinon plus de garantie)

Attention, un onduleur hybride n'a pas vocation à secourir mais bien à alimenter en direct tous les consommateurs du bâtiment. Dans ma précédente maison, j'avais ainsi avec une combinaison SMA (Sunny Boy + Sunny Island) + batterie LG Chem atteint 60% d'autoconso sur l'année pour 60% d'autonomie électrique, il est vrai hors chauffage et mobilité.

Sur la future "centrale" de ma nouvelle maison en combinaison Fronius + batterie BYD, je devrais d'après mes simulations à nouveau être à 60% d'autoconso mais frôler les 75% d'autonomie électrique, avec cette fois la totalité des usages en électrique (mobilité, chauffage et ECS).

Le surcoùt d'installation est alors facilement au moins de 800 euros HT

Je pense que pour un tel système il est important d'augmenter les garanties à 10 ans minimum. C'est déjà le cas pour les batteries, il faut le faire pour l'onduleur

Merci, il manquait en effet de nombreux surcoûts (installateur, coffret) dans mon modèle. Et le prix distributeur de la BYD 13.8 a aussi légèrement augmenté depuis mon calcul.
Ci-dessous les données recalculées : le coût de stockage du kWh monte à 14 cts...

Stockage réseau vs batterie LFP

Mais le but de mon propos est d'illustrer que la rentabilité de l'autoconsommation avec stockage est proche, et nous y préparer en tant que CVs. Il suffirait d'un changement de tarif de rachat pour faire basculer le modèle.

Comme certains, je commence même à penser que le stockage sans production peut faire sens. Il est encore aujourd'hui interdit pour des raisons historiques de stocker chez soi les électrons du réseau mais cela devrait changer rapidement, notamment avec la montée en puissance du Vehicle To Grid.

Si la batterie est donnée pour 6000 cycles, on peut espérer qu'elle tienne 16 ans ? Aujourd'hui, j'en doute mais je peux me tromper

Le sujet de la durée de vie des batteries lithium est passionnant :)

Il n'y a pas encore suffisamment de recul pour disposer de certitudes sur le sujet, mais voici quelques lectures assez édifiantes sur le sujet :

- Sur les batteries stationnaires
Tests de cyclabilité accélérée réalisés en Australie
Tests des combinaisons onduleurs hybrides + batteries les plus efficaces

- Sur les batteries de véhicules
Tesla Model S
Renault Zoé


C.1. Sous forme d'énergie potentielle

Certains ont imaginé de soulever et abaisser des gueuses de béton armé. Leur densité est 2,5 fois supérieure à celle de l'eau. Cela se ferait avec des grues à plusieurs bras disposés symétriquement. Je suis sceptique sur la disponibilité de ces dispositifs par grand vent.

Oui, j'avais identifié cette technologie développée en Suisse.

Je suis comme toi extrêmement sceptique sur l'équilibrage de charges de béton de plusieurs tonnes soulevées par des grues de 120 m de hauteur : voilà pourquoi je ne les avais pas inclus dans ma sélection ;)

Dans la même catégorie d'idée "géniale sur le papier mais quasiment impossible à appliquer en conditions réelles", on trouve le stockage gravitaire par soulèvement d'un cylindre de terre.


C.3. Sous forme de conversion en gaz ("power-to-gas") : la méthanation permet de combler des besoins énergétiques mobiles.

Tu as raison, j'ai écarté beaucoup trop vite cette technologie intéressante.

Voir aussi sur ce sujet l'extrait ci-dessous d'une étude passionnante sur la possibilité de répondre à l'intégralité des besoins en chauffage aux UK via les énergies renouvelables :

Heat pumps with the bulk of their power from renewable electricity: primarily wind and solar provides the opportunity to reduce the amount of land required for biomass energy significantly, however there is still a need for a backup electricity supply when the wind is not blowing. The hourly energy model suggests that around 75% of a heat pumps electricity demand can be supplied directly from a wind and solar supply mix (at equal capacities of each) with 25% needing to be sourced from a backup supply. As explored in the appendix below, this backup requirement stretches several orders of magnitude beyond the capacity of today’s battery technologies and so another solution is required. ZeroCarbonBritain uses biomass and hydrogen produced from excess wind and solar to generate large quantities of methane gas which can then run gas turbines to generate the backup electricity required.

C.5 Sous forme d'énergie électrochimique (batteries) : concernant la disponibilité du lithium, son abondance se fait au détriment de populations et d'écosystèmes fragiles. Ne pas se fier aux seuls calculs économiques des industries minières qui ont l'habitude de taire les trop nombreuses externalités de leurs activités.

Oui, je suis conscient que l'extraction du lithium est catastrophique... je n' "encourage" le développement des batteries que parce que je choisis le moindre des deux maux. L'alternative à l'électrification rapide de toutes les activités humaines étant de rendre la terre inhabitable en continuant de brûler les combustibles fossiles (eux aussi extraits dans des conditions de plus en plus atroces).

D.2 Charger une batterie stationnaire

Je compléterais les commentaires : la présentation du coût du stockage se base sur un cyclage parfait : 6000 cycles, avec une profondeur de décharge de 60% et une recharge à 100% à chaque fois. Je doute que cela soit réaliste sur la durée de 6000 cycles et généralisables à toutes les situations qui dépendent de l'ensoleillement local et des profils de consommations nycthéméraux sur l'année.

Se référer à mon commentaire plus haut avec les références fournies : la durée de vie des batteries lithium et leur tenue en cyclage pourrait bien nous étonner dans certaines conditions (en particulier en adaptant les usages, comme tu le soulignes, aux spécificités de la production intermittente des EnR).

Thibault Hanin

Merci pour la prise en compte des correctifs. En fait, ces correctifs peuvent s'ajuster en fonction des sites, des demandes (nb kWh, intéret du secouru ou pas, devis de l'installateur ....)

Juste une parenthèse : le stockage sans production n'est absolument pas interdit. J'avais failli le faire pour décaler des kWh heures creuses en disponibilité heures pleines. J'entretenais des parcs de secours batteries et la direction envisageait de ce débarrasser de ces parcs batteries qui fonctionnaient comme des horloges suisses. Avec la gratuité du parc, c'était vraiment intéressant.

Ce stockage sans production, on le fait pour faire du secouru, et parfois avec de la production en parallèle (production et stockage pas forcément  lié)

Ce qu'on n'a pas le droit c'est de ré-injecter sur le réseau du courant qu'on aurait pas produit (mais là, ça va forcément changer un jour)

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Emmanuel Dubois, gérant Société ENERSUN
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Le 2020-04-22 01:06, Site Centrales Villageoises a écrit :

En réponse à par Emmanuel DUBOIS

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Merci Emmanuel pour ces précisions sur le stockage !

J'avais failli le faire pour décaler des kWh heures creuses en disponibilité heures pleines.

Je croyais que c'était justement pour cette raison que c'était interdit... merci de m'avoir détrompé.

Au passage, utiliser des batteries de récupération (pour ceux qui ont les compétences) est une idée d'avenir. On commence même à trouver en occasion des Tesla Model S de 100 kWh à 35000€, ce qui fait 350€ du kWh : imbattable, et en plus on peut rouler avec ^^

Thibault Hanin