Pour ce voyage hivernal au cœur des projets, nous partons à la rencontre des premières Centrales Villageoises auvergnates ! Cinq membres de ce collectif récemment entré dans le réseau nous racontent son émergence et ses premières initiatives, axées sur la sensibilisation du grand public à la sobriété énergétique et aux énergies renouvelables.
Votre collectif est récemment entré au sein du réseau des Centrales Villageoises, après s’être structuré autour d’une association nommée « Arverne Durable ». Pouvez-vous nous résumer l’historique de votre démarche ?
Catherine Souchal (CS) : Il y a quelques années, la Communauté de Communes Mond’Arverne avait mis en place un Plan Climat Energie pour réduire la consommation d’énergie du territoire. Ce plan comprenait une charte d’engagement pour les citoyens : les signataires s’engageaient à réduire leur empreinte carbone en mettant en œuvre des écogestes proposés avec la Charte. La communauté de communes avait également, à cette occasion, mené un inventaire des toitures publiques pouvant accueillir du photovoltaïque avec l’aide de l’Adhume. Le potentiel recensé était assez important, mais les communes n’étaient pas prêtes à se lancer elles-mêmes dans l’équipement de toutes les toitures, d’où l’idée de faire appel à une coopérative d’habitants.
Ce fut le sujet de stage de Timothy Marcroft au sein de Mond’Arverne : il a pu établir un rapport sur cette opportunité de création d’une coopérative, ce que ça voulait dire, comment ça pouvait fonctionner…
Christian Gousset (CG) : La Communauté de Communes a commencé par contacter le « Club Climat », qui sont des citoyens qui avaient participé à l’élaboration du Plan Climat Air Energie. Ils nous ont présenté ce qu’il était possible de faire, ce qu’ils attendaient de nous. Après quelques réunions nous étions un petit groupe de citoyens à avoir pris le problème à bras le corps et à s’être embarqués dans l’aventure. Cela a débouché en mai 2022 sur la création de l’association Arverne Durable.
Cette association a pour objectif la création d’une coopérative sur le modèle des Centrales Villageoises, mais on a également fait le choix de mettre les actions de sensibilisation et de sobriété au cœur du projet. On a aussi l’ambition de travailler sur l’accompagnement des publics précaires, en étant un relai pour promouvoir l’action des compagnons bâtisseurs sur leurs actions d’auto-réhabilitation accompagnée.
Quels ont été les premières actions portées par cette jeune association ?
Régis Cestier (RC) : Nous avons commencé par travailler sur le volet sensibilisation, en organisant un achat groupé de kits photovoltaïques avec Solarcoop.
Hélène Carentz (HC) : c’était une façon de mettre le pied à l’étrier, de commencer à parler de photovoltaïque, et puis d’avoir une première démarche de synergie au sein du groupe.
Alain Andanson (AA) : Et c’était une manière de sensibiliser les citoyens, de les inciter à s’équiper en photovoltaïque. Les kits sont composés de 1 à 4 panneaux, ce sont des petits investissements qui permettent d’absorber une partie de la consommation des particuliers. . 14 Kits Solarcoop ont été commandés et répartis sur tout le territoire de la ComCom.
RC : Puis au mois de mai 2022 a été publié l’appel à projet du Budget Eco-citoyen (BEC), ce qui nous a poussé à travailler rapidement sur une proposition, à déposer avant la deadline qui était fin juin.
En quoi consiste ce budget éco-citoyen ?
CG : C’est le département du Puy-de-Dôme qui a décidé d’allouer un budget s’élevant à 2 M€ pour des projets portés par des citoyens et des associations pour des projets à visée écologique ou de sensibilisation à l’environnement. Le dossier devait être bien ficelé : il fallait présenter des devis, des accords de principe des mairies, etc.
HC : Le département veut s’assurer que le projet soutenu est faisable et réalisable dans l’année qui suit. Cet appel à projet a lieu tous les deux ans, ils financent environ 70 projets. Cette année nous avons été déclarés lauréats au mois de novembre, pour une enveloppe d’environ 20 000 €.
RC : Notre proposition comportait 3 volets, chacun porté par un d’entre nous : Alain porte le dossier « Ecojoko », Hélène le dossier « remorque » et moi-même le dossier « 3 kilowatt ». On va vous les présenter dans l’ordre…
Et bien, commençons par « écojoko » ! Késako ?
AA : Ce premier volet concerne la sobriété. En faisant quelques recherches on est tombés sur un boîtier d’une start-up française qui s’appelle écojoko : c’est un système qui se pose sur le compteur électrique de la maison, et qui va mesurer les consommations électriques de l’habitation. Les données s’affichent sur un petit boîtier qui permet de visualiser la consommation instantanée, ainsi qu’une comparaison par rapport à semaine de référence pour évaluer si on sur-consomme ou si économise de l’énergie.
Cela permet déjà de visualiser l’incidence des gestes du quotidien sur la consommation : quand on allume la plaque induction, quand on charge son téléphone, etc. C’est assez pédagogique dans ce sens-là. Ensuite, le système va analyser la consommation et envoyer aux utilisateurs des rapports ainsi que des conseils d’éco-gestes adaptés aux mesures de consommation. Il y a aussi une notion ludique pour motiver les utilisateurs d’écojoko, avec un classement entre les utilisateurs et un système de récompenses virtuelles.
Avec cet outil nous prévoyons une utilisation tournante : nous allons chercher des volontaires, installer l’appareil pour 2 ou 3 mois chez eux, avant de l’installer chez quelqu’un d’autre. On demandera leur autorisation pour récupérer les données de consommation, de manière à réaliser des rapports et publications à l’échelle de l’intercommunalité pour quantifier les économies réalisées par les ménages grâce aux écogestes avec des exemples concrets. S’ils le veulent les participants pourront aussi témoigner de leur expérience à l’occasion de réunions publiques par exemple.
Nous avons prévu le financement de 14 appareils. Nous espérons pouvoir trouver suffisamment de volontaires pour faire tourner le matériel au sein des différentes communes du territoire. Cela nous permettra aussi de faire connaître Arverne Durable !
Nous sommes déjà en contact avec écojoko, et prêts à passer la commande une fois le budget perçu. Il nous reste à définir une petite charte d’utilisation, et surtout à faire la publicité de l’opération pour trouver des volontaires sur l’ensemble des communes. Nous avons d’ailleurs une réunion publique prévue le 28 janvier.
RC : Cet équipement permet d’aller plus loin qu’un simple wattmètre dans l’analyse des consommations, puisqu’il est fixé au compteur mais peut reconnaitre le type d’appareil qui fonctionne dans la maison selon le profil de l’appel de puissance de l’appareil. Et cela tout en étant très simple d’utilisation.
HC : Ce projet permettra aussi de faire du partage de bonne pratique entre les gens, de créer une dynamique positive entre différents foyers. C’est l’opportunité de créer du lien entre les gens, de les faire de se rencontrer…
Passons au 2e projet où il est question d’une remorque : qu’en est-il ?
HC : Notre ambition est en effet de créer une remorque de démonstration et de sensibilisation sur l’énergie, que l’on pourrait déplacer sur les forums, sur les marchés… et qui nous permettrait d’avoir un stand plus visible et attractif !
La remorque serait équipée avec deux panneaux photovoltaïques en guise de toit, équipés de micro-onduleurs. Cela nous permettrait de montrer l’influence de l’orientation sur la production électrique, et on pourrait proposer aux participants de charger leur portable pendant la démo.
Et pour continuer sur la sensibilisation, et pour que les gens se rendent compte ce qu’est le luxe de l’énergie, on imagine de mettre à côté de la remorque un kit permettant aux gens de se faire un café, via un système dynamo. C’est intéressant que les gens voient combien de temps il faut pédaler pour simplement faire un petit café…
Enfin, on souhaite agrémenter ce stand avec une autre démonstration, en partenariat avec le garage collaboratif « La soupape », qui accompagne les gens pour transformer des vélos « classiques » en vélos électriques. L’idée serait de proposer aux gens de tester ces vélos transformés. Dans notre région de petits volcans, l’assistance électrique nous semble indispensable pour déployer le vélo sur notre territoire, au-delà des grands sportifs !
Parlez-nous enfin de ce 3e projet, « 3 kilowatts »…
RC : L’idée est de réaliser une installation photovoltaïque témoin, à dimension du particulier, avec 3 kilowatts crête (kWc) de puissance. L’objectif est de montrer comment on va s’y prendre, et documenter la démarche pour répondre aux craintes des particuliers : quel type de matériel ? d’où vient-il ? est-ce qu’il se recycle ? combien ça coûte ? est-ce que c’est rentable ? au bout de combien de temps ? est-ce qu’il faut autoconsommer ou vendre ? est-ce que c’est assurable ? comment éviter les arnaques ?, etc.
Bref, il y a beaucoup de méconnaissance sur le sujet, et notre idée est de faire de la pédagogie en se basant sur un exemple concret pour répondre à toutes ces questions. On souhaite installer cette installation témoin sur un bâtiment public, avec de l’autoconsommation.
HC : on est dans un secteur qui a subi beaucoup d’arnaques sur le photovoltaïque, c’est donc un vrai sujet ici. Pour beaucoup de gens, voir ce type de réalisation leur donnera plus confiance pour se lancer à leur échelle.
Quel est le calendrier pour tous ces projets ?
HC : Ils devront être réalisés en 2023, c’est le cahier des charges du budget éco-citoyen !
CS : On souhaite se servir de ces trois projets pour donner de la matière à notre communication et faire connaitre notre association. Et en parallèle de ces projets, nous continuons à avancer sur le projet de création de la coopérative Centrales Villageoises. Nous espérons pouvoir créer la société fin 2023.
Propos recueillis par Etienne Jouin
En savoir plus sur le programme d’Arverne Durable dans le cadre du budget éco-citoyen
Voyages au coeur des projets : les archives
Envie de découvrir d'autres initiatives de terrain portées par les Centrales Villageoises ? Retrouver les archives des Voyages au coeur des projets !